la sortie du confinement est annoncée, avec prudence on évoque un certain horizon…pour évoquer le 11 mai, date qui pourrait être reportée si nous manquons de civisme nous rappelle t-on avec cynisme, on précise que cela se fera progressivement, par périodes… le président cite Picasso, pas la Renault qui aura 5 milliards de subventions, mais un peintre périodique qui porte le même nom… le 11 mai c’est dans 15 jours, on a encore le temps de retrouver un vieux compagnon de voyage, qui dormait à la cave. Un bain pour le rucksac, les confinés sont tous des routardsles restaurants relèvent le défi, les cuisiniers proposent des plats à emporter… A la radio les Grands Chefs nous donnent leurs recettes, une autre façon de s’évaderles voisins poètes posent leur prose à la boulangerie, inspirés par les géraniums de la convivialité, l’Alsace est belle et partagée, on remonte chez soi avec la baguette et la feuille impriméel’horizon de la cour arrière est devenu très familier, le moindre bruit fait sursauter, on se répète que cette enchanteresse torpeur ne va pas dureralors on laisse le temps passer, quelques jours encore à se berlureren rire ou en s’offusquer? Ce ne sont plus des calembredaines ou des fadaises: qu’un président propose de boire de la javel pour se soigner laisse incrédule le monde entierl’isolement pour les personnes âgées est une douleur comme la peur d’être contaminé, on leur promet alors des tablettes (numériques) pour communiquer avec leurs proches. On promet aussi 50 euros pour réparer son vélo (mesure vite oubliée), on promet d’être bien isolé dans le train (seule place de libre 754 euros Strasbourg-Bruxelles après le 11 mai), on promet des lendemains qui chantent
L’heure de la sortie, c’est le meilleur moment des confinés, on ne chante pas encore mais on y pense pour nous. Pour ne pas être accusées d’imprévoyance les autorités nous parlent d’horizons et de périodes roses et bleues, et de fourniture numérique dans les Ehpad. Les confinés attendent, les semaines en cette fin avril se ressemblent, vente resto à emporter, barbe à raser, poésie alsacienne à partager. Un spécialiste de l’horreur à Hollywood fait son film, on y boit de l’eau de javel pour se soigner…
LE LIVRE
Le Chat du 28 prend le Soleil, Journal d’un Confiné, Ambroise Perrin, 17 mars – 11 mai 2020,
la vie quotidienne rue Geiler à Strasbourg.
Plus de 500 apostilles et notules en 59 épisodes chronologiques du confinement,