Ambroise Perrin, mercredi 11 novembre 2020
Quand le prof fait une faute au tableau c’est pour voir si nous sommes attentifs. Quand Emmanuel Macron fait deux fautes d’orthographe chez De Gaulle, c’est qu’il est ému (et ça le rend sympathiquement humain). Quand l’ambassadeur de France à Washington offre trois bouteilles d’eau de Javel à Donald Trump, il fait de la publicité pour les produits français (source : AFP, Ambroise Fiction Presse). Quand à Strasbourg des financiers du Qatar ferment le Printemps, le magasin fait la Une des DNA et les propriétaires de l’émirat offrent à chacun des 200 salariés licenciés un abonnement à Charlie Hebdo (même source). Quand l’Obs de ce jour publie que John Lennon a été l’amant de David Bowie, on se dit qu’on aime tous les deux. Quand l’empereur Mutsuhito ouvre le Japon à la modernité occidentale et invite le major-général prussien Meckel à inculquer l’esprit de soumission et d’obéissance militaire à l’armée impériale, il offre quatre ginkgo biloba au Kaiser Guillaume 1erqui les plante à Strasbourg (c’était en 1880, l’année de la mort de Flaubert, et les arbres sont toujours là, magnifiques, place de la République). Quand la maison de retraite à Guebwiller se nomme Les Erables, on pense aux feuilles mortes et aux 32 résidents sur 83, positifs.
Quand on veut échapper à son confinement et que l’on se sent condamné à la bassesse, on se dit que les seules limites sont celles où l’on se morfond. Quand on est seul face à la peur, on comprend que personne ne vous comprend. Quand on passe sa vie à trahir, tout ce qui éloigne l’angoisse semble juste et bon. Quand on vous prouve (dans les journaux, à la radio) que le virus rend anxieux, on fuit l’inquiétude morale, les scrupules et les remords et l’on s’attache à être veule devant l’effort et les conflits moraux. Quand on fait le test et que l’on sent sa chute irrémédiable, fermée à tout retour, on tue l’espoir qui empoisonne la déchéance. Se complaire dans sa lâcheté, toujours Alain Berthier croisé à nouveau pas par hasard, coupable.
Un commentaire sur “La solitude du coupable que personne ne soupçonne, Journal d’un reconfiné (15) –ambroise perrin”